Zoom sur le livre de la semaine :
Les apprentissages autonomes , John
Holt (Éditions l'Instant Présent)
« Comment les enfants
s'instruisent sans enseignement »

Ce que peuvent faire (ou ne pas
faire) les parents (et les enseignants ou tout adulte en rapport avec
des enfants)
Le cerveau humain n'est pas quelque
chose que l'on peut remplir comme un récipient. Il est bien plus
intéressant et fonctionne en créant de nombreuses liaisons au fur
et à mesure des découvertes et apprentissages. Je devrais plutôt
dire qu'apprendre, c'est découvrir !
Tels des chercheurs, les enfants
tâtonnent et reformulent leurs gestes ou leurs questions et affinent
leur compréhension du monde. Trop prétentieux ? Non, c'est la
pure vérité, même s'ils ne le font pas consciemment : les
enfants, comme tout humain, ont une formidable capacité et nécessité
irrépressible d'apprendre et de comprendre ! Si certains de
nous l'ont oublié, eux qui sont en pleine construction le vivent au
quotidien : apprendre c'est vivre, ou plutôt vivre, c'est
apprendre !
« Ce que les adultes peuvent
faire pour les enfants, c'est leur rendre ce monde et ses habitants
plus accessibles et plus évidents. (…) Nous pouvons aussi mettre à
leur disposition des outils, des livres, des enregistrements, des
jouets et toutes autres ressources. Dans l'ensemble, les enfants sont
plus intéressés par ce que les adultes utilisent réellement que
par les petites choses que nous achetons exprès pour eux. »
« Nous pouvons aussi aider les
enfants en répondant à leurs questions. Toutefois, nous, les
adultes, devons faire attention sur ce point car nous avons tendance
, quand un enfant nous pose une question, à en faire trop. »
« Non seulement la leçon non
sollicitée ne conduit pas à un apprentissage, mais -et ça a été
difficile pour moi à comprendre- pour l'essentiel un tel
enseignement empêche l'apprentissage. Et ça c'est une vraie
catastrophe. 90% du temps, d'un enseignement qui n'a pas été
sollicité ne résultera pas un apprentissage, mais en découlera au
contraire un obstacle à l'apprentissage. »
Parfois, et même bien trop souvent,
adultes bien intentionnés, nous essayons de les aider, et nous en
sommes bien mal récompensés (d'ailleurs n'y a-t-il pas là une
double intention de rendre service non pas seulement à l'enfant ou
l'apprenant, mais d'être fiers de nous-même en de montrer cette
image d'adulte référent, consciemment ou non?) : pourquoi ?
« A chaque fois que, sans y avoir
été invité, sans qu'on nous l'ait vraiment demandé, nous essayons
d'apprendre quelque chose à quelqu'un d'autre, à chaque fois, nous
communiquons à cette personne un double message. La première partie
de ce message c'est : « Je vous enseigne quelque chose
d'important, mais vous n'êtes pas assez intelligent pour voir à
quel point c'est important. Si je ne vous l'avais pas appris, vous ne
vous seriez probablement jamais donné la peine de vous renseigner. »
Le second message que communique un enseignement non sollicité à
celui qui le reçoit, c'est : « Ce que je vous enseigne
est si difficile que, si je ne vous l'enseigne pas, vous ne serez pas
capable de l'apprendre. »
Ce double message de manque de
confiance et de mépris est clairement compris par les enfants, parce
qu'ils excellent à recevoir les messages émotionnels.(...) Tous les
enseignements non sollicités contiennent ce message de manque de
confiance et de mépris. (…) Le problème c'est que les êtres
humains aiment enseigner. Nous sommes des animaux enseignants, autant
que des animaux apprenants. Nous devons refréner cette impulsion,
cette habitude, ce besoin d'expliquer les choses à tout le monde...
à moins qu'on nous l'ait demandé. »
Le pouvoir de l'exemple et la voix des
adultes
Beaucoup de jeunes enfants ont en effet
besoin d'être initiés à des tâches et des activités qui
demandent du temps, de la concentration, de l'effort et de la
dextérité. Cependant, cela ne consiste pas à « donner »
des tâches de plus en plus difficiles et à obliger l'enfant à
s'obstiner jusqu'à ce qu'il ait terminé. Dans de telles situations,
le facteur déterminant c'est la volonté de l'adulte et non, comme
ça devrait l'être, les exigences de la tâche. Au contraire,
ce dont les jeunes enfants ont besoin d'avoir l'occasion de voir des
enfants plus âgés et des adultes choisir et entreprendre des tâches
variées puis travailler dessus pendant un certain temps jusqu'à ce
qu'ils aient terminé. Les enfants ont besoin de comprendre les
processus qui mènent à un bon travail. La seule manière qu'ils ont
d'apprendre combien de temps et d'effort il est nécessaire pour
fabriquer, mettons, une table, c'est d'être en mesure de voir
quelqu'un fabriquer une table, du début jusqu'à la fin. Ou peindre
un tableau. Ou réparer un vélo, ou écrire une histoire, ou toute
autre chose. »
Voir et observer la somme de travail
que nécessite une activité des premières étapes au produit fini
ou à l'étape finale : cela montre une continuité dans les
savoir-faire de chacun ou d'une même personne, et les efforts
récompensés par la progression et le plaisir du travail bien fait.
Permettre aux enfants de voir qu'une grande personne « ne les
estime pas trop petits ou stupides pour les associer » à un
travail important pour des adultes.
D'une même manière, « lorsque
des personnes réelles parlent, les enfants veulent entendre leurs
voix, voir leurs visages et ils en retirent beaucoup », même
si les adultes trouvent que ce sont des conversation de « grandes
personnes ».
L'enseignement est une science
naturelle
« Aider les enfants à apprendre
et à explorer le monde peut s'assimiler à une branche des sciences
naturelles (…) Au milieu du dix-neuvième siècle, le zoologiste
Louis Agassiz a commencé un cours à l'université en plaçant un
poisson sur un plateau et il a demandé aux étudiants de le décrire.
A chaque fois qu'ils pensaient avoir dit tout ce qu'il y avait à
dire et qu'ils lui apportaient leur copie, il disait juste :
« Et ensuite ? » Il leur demanda de regarder et de
décrire ce poisson jusqu'à ce qu'ils aient vu cent fois plus que ce
qu'ils pensaient pouvoir y voir. C'est cette capacité à observer et
ensuite à décrire précisément ce qui a été vu qui est la marque
des grands naturalistes et qui est indispensable à un bon
enseignant. »
« Les enfants ont chacun leur
propre style -unique- d'apprentissage. Ils ont aussi leurs propres
rythmes en fonction desquels ils sont prêts à faire les choses, à
la vitesse qui leur convient, en décidant du temps qu'ils mettront à
passer à autre chose. Quand nous essayons de les diriger,
d'interférer ou de changer leurs styles d'apprentissage et leurs
rythmes, nous les ralentissons ou nous les stoppons presque toujours.
C'est plus facile à constater chez les jeunes enfants car les choses
qu'ils apprennent sont bien visibles : des compétences simples,
le nom des lettres, de nouveaux mots. Si Billy nous a demandé le nom
des lettres qu'il voit et qu'il s'arrête tout à coup parce que nous
commençons à l'interroger, nous constatons qu'il s'est arrêté.
Chez les jeunes enfants, les changements de comportement sont nets et
évidents. De plus, ils n'essaient pas de dissimuler leurs actes,
leurs pensées et leurs sentiments (tout ceci étant en fait un tout,
vécu comme un tout par les enfants et toute personne saine), car
ils n'ont pas appris à le faire. Les enfants plus âgés peuvent
apprendre à se cacher de nous, à nous rouler. Par peur, même des
élèves de CP deviennent des adeptes de la dissimulation et
élaborent des stratégies d'évitement. Quand j'ai écrit Parents et
Éducateurs devant l'échec scolaire *, c'est seulement après des
mois d'observation de mes CM2 et de prises de notes consciencieuses
que j'ai été en mesure de percevoir les schémas comportementaux
engendrés par l'échec et grâce auxquels ils arrivaient à le
dissimuler. »
Les enfants « agissent en
permanence comme des scientifiques en regardant, remarquant,
s'interrogeant, théorisant, testant leurs théories et en les
modifiant aussi souvent que nécessaire», et c'est en agissant de
même qu'on peut les accompagner dans leurs apprentissages.
Corriger les erreurs
Quand les enfants apprennent à parler,
nous passons souvent notre temps à essayer de le corriger, parfois
trop : si c'était un étranger qui apprenait la langue et nous
rendait visite, nous trouverions impoli de corriger sans cesse toutes
ses fautes, et pourtant c'est ce que nous faisons avec nos propres
enfants... A sa place, « vous finiriez par ne plus dire
grand-chose, voire plus rien du tout »... par peur de ne rien
dire de correct. D'où l'importance de l'approbation (sans en faire
trop non plus, mais savoir reconnaître les progrès et pas seulement
les erreurs).
Nous donnons déjà toute l'aide dont
notre enfant a besoin « en utilisant la langue nous-même » :
l'exemple, encore l'exemple !
« Il est toujours mieux pour un
enfant de réussir à comprendre quelque chose par lui-même plutôt
que de recevoir une explication – sauf, bien-sûr, si
l'apprentissage se fait au péril de sa vie comme dans le cas où il
traverserait la rue en courant. (…) D'abord on se souvient mieux de
ce qu'on arrive à comprendre tout seul. Ensuite, beaucoup plus
important, à chaque fois qu'on comprend quelque chose tout seul, on
prend confiance dans sa capacité à comprendre les choses tout
seul. »
« Nous nous leurrons si nous
pensons qu'en disant les choses gentiment nous empêcherons les
corrections d'être prises comme des reproches. C'est uniquement dans
des circonstances exceptionnelles et avec le plus grand tact que vous
pouvez corriger un adulte sans le vexer, dans une certaine mesure.
Comment pouvons-nous penser qu'un enfant, dont la personnalité,
l'ego et l'estime de soi sont tellement plus fragiles, peut accepter
sereinement d'être corrigé ? Je dirais que dans 99 cas sur
cent, n'importe quel enfant prendra sa correction comme une sorte de
reproche, même si nous nous montrons enthousiastes, détendus ou
stimulants. Je suis très affirmatif à ce sujet car je l'ai trop
souvent vu de mes propres yeux. »
« Il est à la fois vrai et
trompeur de dire que les enfants veulent apprendre. Oui, ils veulent
apprendre, mais de la même manière qu'ils veulent respirer.
Apprendre, pas plus que respirer, n'est un acte volontaire pour les
jeunes enfants. Ils ne pensent pas : « Maintenant, je vais
apprendre ceci ou cela. » C'est dans leur nature de chercher
autour d'eux, d'embrasser le monde avec leurs sens et de lui donner
du sens, sans savoir pour autant comment ils le font, ni même qu'ils
le font.(...) La vérité est que toute personne qui vit
réellement, qui s'expose à la vie et qui va à a rencontre avec
énergie et enthousiasme, est en même temps en train d'apprendre. Ce
sont les inquiétudes au sujet des apprentissages qui éteignent les
apprentissages des enfants. Quand ils commencent à voir le monde
comme un lieu plein de dangers dont ils doivent se protéger, quand
ils commencent à vivre moins librement et pleinement, c'est à ce
moment-là que se flétrissent leurs capacités d'apprentissage. »
« Même quand les enfants
atteignent l'âge auquel ils commencent, parfois à apprendre
consciemment et délibérément quelque chose qu'ils veulent
apprendre, il ne s'ensuit pas qu'ils souhaitent toujours recevoir une
explication. Un enfant bien portant préférera toujours comprendre
les choses par lui-même. Il y a peu, un enseignant brillant a résumé
admirablement ce phénomène : « Lorsqu'on souffle une
solution à celui qui cherche, ça le met en rage ! »
Accrocs aux félicitations
Trop féliciter les enfants a un effet
destructeur sur la plupart des enfants : ils manquent alors de
confiance en eux et deviennent dépendants de ces louanges.
Ce que les enfants veulent et ce dont
ils ont besoin de notre part c'est une attention authentique. Ils
veulent que nous les remarquions et que nous prêtions attention à
ce qu'ils font, que nous les prenions au sérieux, que nous leur
fassions confiance et que nous les respections en tant qu'être
humains. Ils veulent courtoisie et politesse, mais ils n'ont pas
besoin de louanges. »
La nature de l'apprentissage
L'éducation n'est
pas une usine remplissant des récipients, la métaphore la plus
courante. On verse tant d'années de maths, tant de langue
maternelle, tant de langues étrangères, tant de sciences etc...
« On suppose que tout ce qui sera versé en direction du
récipient ira dans le récipient, et qu'une fois dedans il y
restera.
Personne ne semble
se poser une question évidente : comment se fait-il que tant de
récipients, tant d'enfants ayant pourtant reçu ces matières
pendant tant d'années, continuent à sortir vides de l'usine ?
En dépit d'un siècle de résultats qui la contredisent, les
éducateurs s'accrochent à l'idée que l'enseignement produit de
l'apprentissage et que, donc plus on enseigne, plus les enfants
apprennent. Pas un seul des rapports que j'ai lus ne soulève de
questions sérieuses au sujet de ce présupposé. Si les élèves
n'en savent pas assez, c'est parce que nous ne commençons pas le
remplissage assez tôt (commençons dès quatre ans!) ou qu'on ne
fait pas le remplissage avec les bons ingrédients, ou pas à la
bonne dose (renforçons le programme!).
Une deuxième
métaphore dépeint les élèves comme des rats de laboratoire dans
une cage, qu'on entraîne à réussir un tour – la plupart du temps
un tour qu'aucun rat dans la vraie vie ne serait amené à
accomplir.(...) Les renforcements positifs à l'école sont des
sourires des professeurs, les bons points, les 20/20 sur les
bulletins de notes, les tableaux d'honneur et, à la fin, l'entrée
dans de prestigieuses universités, de bons emplois, un travail
intéressant, de l'argent et le succès. Les renforcements négatifs
sont les réprimandes colériques, les sarcasmes, le mépris,
l'humiliation, la honte, les rires de dérision des autres enfants,
les prédictions d'échecs, les menaces d'exclusion et de renvoi de
l'école. » Pour certains, cela va même jusqu'aux châtiments
corporels ! « En fin de course, c'est l'entrée dans une
mauvaise université ou aucune, de mauvais boulots ou aucun, un
travail ennuyeux si on en a un, peu ou pas du tout d'argent.
La troisième
métaphore est peut-être la plus destructrice et dangereuse de
toutes. Elle décrit l'école comme un hôpital psychiatrique, un
centre de traitement. Les écoles, qu'elles soient bien ou mal
classées, opèrent toujours selon cette règle merveilleusement
pratique que quand l'apprentissage réussit, c'est grâce à l'école
(…) ; et quand il échoue, c'est la faute des élèves. Il y a
plusieurs manières de formuler « cette » faute. Dans une
école élémentaire privée très réputée, un enseignant aguerri
l'a expliqué ainsi : « Si les enfants n'apprennent pas ce
qu'on leur enseigne, c'est parce qu'ils sont paresseux, mal organisés
ou perturbés mentalement » et presque tous ses collègues
l'ont approuvé.
Plus récemment,
cependant, des éducateurs ont trouvé une autre explication au
défaut d'apprentissage : « les troubles de
l'apprentissage ». Cette expression est devenue populaire parce
qu'elle peut concerner presque tout le monde. (…)
Les « recherches »
qui ont défini ces étiquettes sont tendancieuses et guère
convaincantes. » D'autres recherches montrent « que
lorsque des étudiants soi-disant atteints de graves troubles de
l'apprentissage étaient placé dans une situation moins stressante,
leurs difficultés disparaissent rapidement.
Ces trois
métaphores présentent « une fausse image de la réalité. Les
écoles présupposent que les enfants n'aiment pas apprendre et
qu'ils ne sont pas très doués pour cela, qu'ils n'apprendront rien
à moins qu'on le leur fasse apprendre, qu'ils ne peuvent rien
apprendre à moins qu'on ne leur montre comment faire ; et que
la manière de leur faire apprendre des choses est de diviser ces
domaines prescrits en minuscules tâches à maîtriser une à la
fois, chacune avec sa carotte et son bâton. Et quand cette méthode
ne fonctionne pas, les écoles en déduisent que ce sont les enfants
qui ont un problème – problème qu'ils doivent tenter de
diagnostiquer et de traiter.
On peut facilement
observer que les enfants sont passionnément désireux de comprendre
le plus possible le monde qui les entoure, qu'ils sont très doués
pour cela et qu'ils le font à la manière de scientifiques, en
créant de la connaissance à partir de l'expérience. Les enfants
observent, s'interrogent, découvrent, élaborent et ensuite ils
testent les réponses aux questions qu'ils se posent. Quand on ne les
empêche pas de faire toutes ces choses, ils continuent à les faire
et deviennent de plus en plus compétents. »
Apprendre, c'est
donner du sens aux choses
Les enfants
« aiment éliminer les contradictions. Ils sont mal à l'aise
avec les paradoxes. Ils aiment donner du sens aux choses. Cependant
il faut qu'ils puissent le faire à leur rythme.
Tant que le schéma
mental d'un enfant le satisfait, tant qu'il reste approprié pour
lui, les corrections n'ont pas de sens et ne servent à rien. Elles
glissent sur lui. Les corrections qu'il fait lui-même ou du moins
qu'il est d'humeur à écouter, sont les corrections dont il a
besoin. »
Quand « il y
a un petit vide dans notre connaissance et notre compréhension et
tout à coup, peut-être dans un livre, peut-être grâce à une
expérience, émerge une idée et elle colle exactement. On la sent
pratiquement s'engouffrer dans le trou et s'y encastrer parfaitement.
On n'oublie pas ce genre de moments. C'est ce type d'expériences que
les enfants vivent. Ils ne peuvent pas nous expliquer ce que sont ces
choses. Ils n'ont pas les moyens de nous le dire. »
« Au fil des
ans , j'ai remarqué que l'enfant qui apprend vite est un
aventurier : il est prêt à prendre des risques, il aborde la
vie les bras ouverts, il veut tout embrasser. (…) il s'attend à
comprendre les choses, tôt ou tard. Il a une espèce de confiance.
Pour un enfant qui
réussit moins bien, le monde n'est pas seulement un endroit dénué
de sens, il est aussi plein de pièges. L'enfant ne sait pas ce qui
va arriver, mais il a l'intuition que ce ne sera pas très bon. Il
n'a pas confiance.
L'enfant qui
réussit est plein de ressources et il est patient aussi. Il essaiera
quelque chose d'une manière et s'il n'y arrive pas, il réessayera
d'une autre et, si ça ne marche toujours pas, il essaiera encore
autrement. En revanche, l'élève qui ne réussit pas n'a ni les
ressources pour envisager ces différentes options, ni la patience de
s'accrocher.
(…)
Les adultes
doivent avoir conscience du flux et du reflux du courage et de la
confiance chez les enfants, à l'image des marées. »
« Un enfant
se fait tout petit quand le monde lui fait peur, quand il subit une
défaite. Pourtant quand un enfant fait une chose qui le passionne,
il grandit comme un arbre, dans toutes les directions. C'est ainsi
que les enfants apprennent, que les enfants grandissent. »
« Nous avons
tendance à être condescendants ou à prendre un air amusé
vis-à-vis des fantaisies et des histoires des enfants. « C'est
une belle histoire, Jimmy, mais tu sais bien que ce n'est pas vrai. »
Pourtant l'enfant s'est engagé dans un travail très sérieux. Il
n'est pas juste en train de s'amuser ; il essaie de se faire une
représentation de l'univers à une échelle véritablement bien plus
grande que ce que, nous, adultes, nous n'osons le faire. (…) Les
enfants sont des philosophes au travail. Nous devrions leur laisser
du temps pour penser. »
Vivre, c'est
apprendre
Nous apprenons de
toutes nos expériences, même lorsque nous choisissons de ne rien
faire ou de ne rien décider.
La curiosité est
inhérente à l'espèce humaine, et les enfants ont ce même « désir
passionné de comprendre tout ce qu'ils peuvent du monde, même ce
qu'ils ne peuvent voir ni toucher. Ils ont le désir d'acquérir
autant que possible des aptitudes, des compétences et de s'en
servir. » Un besoin aussi physiologique, voire même plus fort
que celui de nourriture, de chaleur et de réconfort...
« Les
enfants ne sont pas seulement extrêmement doués pour apprendre ;
ils sont bien plus doués pour cela que nous. En tant qu'enseignant,
j'ai mis beaucoup de temps à le découvrir.(...) Et ce n'est que
très lentement et douloureusement -croyez-moi, douloureusement- que
j'ai réalisé que c'était quand je me mettais à enseigner le moins
que les enfants se mettaient à apprendre le plus.
Je peux résumer
en quelques mots ce que j'ai finalement appris en tant qu'enseignant.
(…)
L'apprentissage n'est pas le produit
de l'enseignement.
L'enseignement ne fait pas
l'apprentissage.
Les apprenants
font l'apprentissage. Les apprenants créent l'apprentissage. On
l'a oublié parce que le fait d'apprendre a été transformé en un
produit nommé « éducation », exactement comme
l'activité qui consiste à prendre soin de sa santé est devenue le
produit « soin médical » et l'activité de faire des
recherches sur le monde est devenu le produits « science »,
un truc spécialisé accompli uniquement par des gens dotés
d'appareils compliqués coûtant des milliards de dollars. Or la
santé n'est pas un produit et la science est quelque chose que vous
et moi pratiquons tous les jours de notre vie. De fait, le mot
science est un synonyme du mot apprentissage. »
Les enfants apprennent de tout ce
qu'ils expérimentent et observent, et ce, où qu'ils soient, et pas
seulement dans les lieux spécialement prévus à cet effet ; et
« ils sont plus intéressés par les objets et outils que nous
utilisons dans notre vie quotidienne que par la plupart du matériel
éducatif spécialisé fabriqué à leur intention. »
Prêtons-leur simplement et
véritablement attention, et répondons à leurs questions s'ils en
ont, mais juste à leurs questions...
La semaine prochaine la suite :
des pistes concrètes pour les aider à
faire leurs propres connexions, leurs propres apprentissages.
* Traduction du livre How Children
Fail, paru aux éditions Castermann en 1964 (John Holt)
Ceci est un article des Vendredis Intellos : suivez le lien :
![]() |
les vendredis intellos |
Merci pour ton article très intéressant. Est-ce que tu serais ok pour que je mettes un petit extrait sur mon blog avec un lien vers le tien ? Pas la peine de récrire ce que tu as si bien expliqué ! ;o)
RépondreSupprimerBien sûr tu peux le faire ! Je suis débordée en ce moment pour écrire tous les articles et tous les commentaires qui me font envie/réfléchir/réagir, mais celui-là attendait depuis quelques mois déjà, reste à en écrire la seconde partie, plus pragmatique mais très intéressante aussi ;)
SupprimerJe poursuis donc ici mon commentaire commencé sur le blog collectif...
RépondreSupprimerDIfficile de tout commenter sur ce très long et très riche article...
Je réagirai simplement sur la base des quelques éléments dont je dispose en sciences de l'éducation...
Tout d'abord, à propos de l'apprentissage "naturel" de l'enfant et de l'idée de "correction"... le principal souci est que certes l'enfant apprend un peu comme un chercheur en faisant des hypothèses qu'il va vérifier MAIS dans un certain nombre de disciplines (les sciences notamment) la vie quotidienne peut conduire à des conclusions erronées par rapport aux savoirs scientifiques (contrairement à l'apprentissage des langues qui peut lui se faire totalement par "immersion" dans un bain de langue)... Je te donne un exemple: l'expérience quotidienne nous fait distinguer le "chaud" du "froid" ce qui du point de vue scientifique n'a aucun sens, l'expérience quotidienne nous fait croire que nous vivons dans un "bain de lumière" alors que c'est la diffusion liée à l'atmosphère qui produit cet effet (inexistant sur la lune par exemple...)... Les exemples sont très nombreux et la question d'amener les enfants à percevoir les limites de leurs théories intuitives (puisqu'il ne s'agit pas ici de "corriger" mais bien d'opérer un "changement conceptuel") est aussi un vrai défi!!
Ensuite, concernant les différentes métaphores que tu cites... Pour ma part, elles ne me choquent pas le moins du monde, elles représentent exactement les préjugés que l'Education Nouvelle (qui n'est plus si nouvelle que ça!!!) a cherché à combattre... Actuellement, les recherches en éducation combattent ses préjugés aux quotidiens dans leurs investigations... malheureusement ne parviennent, pas plus que les théories de l'Education nouvelle, a être prises en compte dans les réformes récentes sur l'Ecole...
Ceci nous ramène à l'idée que l'Educ Nat est une grosse machine, qui est très très très loin d'être gouvernée par la raison et les idées... et c'est peut être la première chose à changer!!
C'est vrai qu'on ne peut tout apprendre seul, comme tu le dis, un accompagnement ajusté et une mise à disposition des supports et rencontres sur-mesure sont une nécessité !
SupprimerJ'ai répondu sur les Vendredis Intellos en partie aussi, car la suite de mon article partagera aussi quelques propositions et idées à développer ou à commenter, entre autres, en plus des quelques solutions pragmatiques pour les apprentissages premiers (maths, lecture...)
En tous les cas, il y a du boulot, et il faut cesser de ne faire que regarder en arrière et aller de l'avant, constater ne suffit plus devant le malaise grandissant des élèves, des enfants, des ados...